Les tontons joueurs : Winner Contest#3
écrit par canard99


      

C’est Riton la trogne, dit gros Kamahl qui m’avait mis sur la piste cette fois ci. On avait rencard à la maison mère. J’avais fini de monter la veille un WelderMachine 2005 modèle Boston, un p’tit bijou de flingue, un calibre sophistiqué, bref une arme de César. Riton avait absolument voulu le reluquer et ma foi, j’étais pas peu fier de lui prouver qu’avec son RockySilvos, on jouait pas dans la même catégorie. Mais quand il était arrivé, le gros, il avait traversé la pièce en braillant comme une charolaise qu’on mène à la calenche.

_« Canard, ça chauffe à l’ouest... »

Faut dire que l’ouest pour Riton, ça commençait à gauche en sortant de l’hippodrome d’Auteuil alors j’ai attendu la suite pour savoir s’il y avait péril en la demeure.

_« Y paraîtrait qu’y a des grosses réunions dans une ville en banlieue, une sorte de clandé où des gus se retrouvent à beaucoup pour se partager le pactole, ni vu ni connu. C’est pas légal ça, dans le milieu, hein !!! »

_« Dis donc, mon Riton, t’as raison, c’est gravos ça !!! C’est pas déontologique (j’aime bien parler littéraire devant Riton, ça lui donne la même gueule que quand il essaie de savoir si sa bourgeoise monte vraiment aux rideaux ou pas). Va falloir aviser !!! C’est où, cette sale embrouille ? »

_« Nogent le Rotrou »

_« Bon, c’est limite de secteur, cette affaire. Et pour la banlieue, tu repasseras. Elle prend ses aises, la banlieue, elle s’étale la banlieue. Je sais bien que pour toi, si y a pas l’métro c’est pas la banlieue mais quand même... Enfin... t’as raison, si c’est un bon tuyau, y a pas de mal à se faire du gras. »

Maintenant, fallait rassembler l’équipe. Après notre trouage de cul de GP Panam, les gars n’étaient plus chauds pour sortir, surtout à cette époque où on se la coule douce avant le grand dîner de cons des régionaux. J’ai convoqué la crème de l’équipe et quand ils se sont pointés : ni une, ni deux, j’ai pris d’autorité le ton du Général sauveur des gaules !

_« Bon, les gars » : j’leur dis. « Demain, direction Nogent le Rotrou, capito ? C’est facile comme blaise, on charge le matos dans la Pontiac, on débarque, on s’explique, on tope le bénéfice et retour !!! Amen ».

_« Nogent le Rotrou !!! C’est quoi ça !! C’est une guinguette ? »

_« Tais toi, triple con !!!!! Au lieu de sortir le dimanche pour butiner les poules sur les berges de la Marne, tu ferais mieux de réviser ton brevet élémentaire. C’est en Eure et Loir !!! »

_« J’ai un pote dans le show biz qui m’a dit que là bas, y a que des ploucs et de la bourbe, j’suis pas chaud, chef... »

_« Mais non, tartuffe ! J’le connais ton pote, le Delpech, un mec à foutre à la casse. C’est du Loir et Cher qui parle, alors vous arrêtez de me faire des tronches d’huîtres au soleil, ramassage demain matin à 7 heures et on y va. Rompez les rangs...

...Y a pas à discuter, Nogent le Rotrou, c’est pas en banlieue. Même en mettant la sauce, ça fait quand même son petit bout d’chemin. Faut traverser des champs avec des vaches vivantes au milieu et éviter des bouseux en tracteur qui sont déjà pris une malle au gros rouge à 8 heures du mat’. En arrivant dans les faubourgs, j’avais la dalle en pente, et on s’est arrêté à la boulange. Quand je pense que y en a qui paient pour aller voir la Joconde alors que, pour queue dalle, t’as la petite boulangère de Nogent avec ses roberts comme des brioches dorées prêts à te sauter à la poire. C’est pas humain, une gisquette pareille, un coup à se tromper de levier de vitesse en remontant en bagnole. J’ai bien cru que j’allais compter fleurette mais String (c’est lui qu’a le Ravager) a eu la présence d’esprit de klaxonner...

C’est con, les villes de province, mais comme ils sont tous à moitié cousins/cousines tout le monde se tambourine, y pense jamais que quelqu’un va s’arrêter dans leur bled de consanguins !! Alors, tu tournes, tu tournes, tu tournes… et tu trouves pas. Comme en plus, y sont tous à la messe, ces blaireaux, il a fallu que ce soit le Bon Dieu lui-même qui nous remette dans le droit chemin (comme quoi, il est pas toujours là où on l’attend) et on n’a quand même fini par trouver le centre socioculturel au-dessus de la bibliothèque. Un truc massif ! Avec un escadrin en pierre dure, une rampe en bois d’arbre et des planchers qui grincent. Du vieil immobilier, restauré après guerre et pas retouché depuis. Limite si les gogues étaient pas en bronze.

Dès que je suis entré dans la salle, j’ai reconnu la vitrine du proprio : David Lavergne !!!!! On n’était pas tombé chez un manche : level 1 à la Coupe de France à Paris en 2001, level 2 en 2002 : un multi récidiviste en Grand prix: Biarritz, Reims, Lyon, Göteborg, Munich… et en Pro tour : Boston, Venise, La Nouvelle Orléans etc… Il en avait déjà un wagon au compteur, l’arsouille.
Je me suis mis à gamberger salement : Mais qu’est ce qui pouvait bien foutre dans ce trou paumé ? C’était p’têt sa planque ? Y avait un contrat sur lui pour qu’il se mette au vert comme ça? J’avais entendu parler d’une sale affaire qu’il avait eu avec une italienne en Suède, le genre de sicilienne à qui il faut pas manger la culotte, ni chercher à enculer………Elle avait peut-être des frérots qui voulaient épingler le David et il avait trouvé prudent de passer des vacances à campagne sur mer….

Je dis aux autres de déballer tout sans saloper comme la dernière fois, parce qu’y avait quand même pas mal de sales gueules dans l’assistance. On s’est vite retrouvé à presque cinquante à passer devant monsieur Lavergne pour filer le flouze comme les navets à la quête le dimanche à l’église. Puis y a eu comme un silence et on entendait même une petite qui fracassait son Chopin sur un piano dans la salle du dessus et ça a commencé...

Pendant une accalmie, je suis allé voir le Lavergne :

_« Dégoise » : que j’y dis « Qu’est que tu fous là ? »

_« Je turbine à Nogent, alors le milieu de Limoges a voulu que je monte une affaire ici. »

_« Et ça tourne comment ? »

_« Au début, j’ai dû ouvrir le larfeuille mais tu vois maintenant ça roule, tranquille. J’ai pas mal de gars du coin, mais aussi du Mans et d’ailleurs vers la Loire. »

_« Pas d’ennui avec les cognes ? »

_« Tu rigoles, je fais tout ici, le transport, la bouffe, le matos, j’ai personne sur le bâti, je suis free-lance comme disent les ricains, alors pas de risque de fuites, on est bien entre nous, y a pas de lézard !!»

J’ai pris un sandwich à la purée d'anchois et je suis reparti faire un carton…… j’étais bien lesté, d’ailleurs dans les situations critiques, quand on a un bon deck bien en pogne, personne ne conteste plus. Y'a des statistiques là-dessus ! Je vais pas vous raconter l’après midi en long, en large et en travers. Comment ça s’est passé, vous s'y pigeriez nada et vous n’aviez qu’à y être. Mais je vais vous dire une chose : ça valait bien le coup de venir à Nogent le Rotrou !!!
Quand on a pris la tangente, on avait tous les profondes bien remplies, avec du bon booster tout chaud. Et oui, les aminches, Monsieur Lavergne, c’est un cousin à Rockfeller !!! Jamais vous verrez des réunions aussi gourmandes. Le vainqueur emporte une caisse pleine et le reste est à la demande. Et si vous vous faites chier pendant que les grands s’expliquent entre eux, on vous met dans un petit bac à sable pour que vous puissiez quand même vous mettre des coups de decks et ramasser un lot de consolante.

Oui, en roulant dans la floconnade pour rentrer au bercail, on dégoisait sur la tech Intuition sur j’suismort, j’suismort, j’suismort ; sur la réserve de String avec ses quatre cartes injouables ; sur la rincette de whisky qui vous remet en selle pour le Top8 ; sur l’adversaire des quarts de finale qui fait un "nervous breakdown" et les aigris qui ouvraient leurs claques-merde. Bref, on trouvait que Nogent le Rotrou, c’était vraiment bien, qu’on y retournerait bien le 13 mars et quand je dis ça, je pense aussi à la petite boulangère au bustier farceur...



PTQ Nogent le Rotrou
Date: 13 mars 2005
Format: Etendu
Lieu: Centre Pierre Mendes France
28400 Nogent le Rotrou
Organisateur: David Lavergne / lavergne.dav@wanadoo.fr