"Petites éclipses" de Fane (plus connu pour "Jo Bar Team" et Jim (toute une panoplie de BD du genre "Tout ce qui faita râler les nanas"
C'est vraiment à l'aveugle que je me suis lancé dans la lecture de ce pavé de plus de 300 pages. Et je ne le regrette vraiment pas ! Une couverture un peu envoutante, un titre un brin mystérieux, il n'en fallait pas plus pour me motiver et m'inciter à passer le pas. Les éclipses restent malgré nos connaissances un des grands spectacles et mystères de la nature, et qui nous attirent comme des aimants...
Et côté spectacle, on est servi ! Car cette réunion de "vieux potes" à l'occasion d'une éclipse totale dans un gîte du sud de la France pendant 4 jours part dans tous les sens ! Tirages de gueule, règlements de compte, poilade, délires absolus et granguignolesques (si si, la scène de la "course à la douche" est assez hallucinante et hilarante !), nous composent une fresque de la fameuse "crise de la quarantaine" assez réaliste et sympathique. C'est sans complaisance qu'ils triturent les relations de couple et l'amitié : quand ça fait mal, ça fait mal, quand ils sont salauds, ce n'est pas qu'à moitié, et tout ça se sent dans l'écriture de cette BD. Car la solitude, grand thème ici, ça fait mal.
Fane et Jim, j'avoue, m'ont un peu troué le cul avec cet album, vu ce que je connaissais de leur production respective, qui donnait plutôt dans le lourdingue à mon goût.
Là, j'ai pris un réel plaisir à suivre cette bande de potes, et c'est avec hâte que j'attendais de pouvoir reprendre ma lecture quand j'étais obligé de poser ma BD. En même temps, j'étais content de prendre mon temps, de savourer ces personnages complexes et un brin torturés. Je n'avais pas envie que ça s'arrête... Ça, ça ne trompe pas et c'est plutôt bon signe !
Et je leur tire d'autant mon chapeau, que la réalisation même de cet album est vraiment originale, travailler chacun sur des personnages précis de l'histoire, s'atteler tous les deux au dessin, ça peut vite partir en vrille. Mais là, non, ça tient parfaitement la route !
Car côté dessin, c'est vivant ! Ça tombe bien, c'est de ça qu'on parle, de la vie et de ses tourments. C'est expressif. Les planches sont admirablement composées, et le découpage est intelligent, avec parfois des pleines pages qui posent les choses et nous reposent quand ça commence vraiment à torpiller à tout va.
Leur dessin noir et blanc est tantôt vif, précis, fourni en détails, et parfois extrêmement sobre et rocailleux, à la limite de l'esquisse. On a même le droit à une case noire assez merveilleuse pour un baiser...
Bref, c'est parfois comme lors d'une éclipse, en cachant, qu'autre chose se révèle, et j'avoue avoir été assez bluffé et conquis par cette collaboration de Jim et Fane. J'ai même préféré cet opus au plus récent album "L'invitation", de Jim, qui décidément se pose beaucoup de questions sur l'amitié et la quarantaine... Mais quand c'est traité comme ici avec tant de brio, on ne va pas bouder notre plaisir !
Sinon, côté roman, je viens d'attaquer "Clear", le dernier roman du frère d'EV... Et c'est plutôt bien parti :]
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