merci, ça m'inspire. Moi qui n'avais jamais pris le temps de lire Zweig, ça me donne envie de le lire, surtout qu'il est dans mes rayonnages. :]
De mon côté, fini le roman "Ouragan" de Gaudé, un très très bon roman avec des personnages d'une grande force et quelques scènes magistrales !
Côté BD, du Loisel, "Miss PAtouche" et "Nicolas Eymerich Inquisiteur" : du cul, les années folles et du fantastique.
"Troubles fêtes" de Loisel et Rose Le Guirec
S'il est vrai que la pulpeuse Pélisse de "La Quête de l'Oiseau du Temps" avait déjà de quoi faire fantasmer, Loisel passe ici avec Rose Le Guirec à la vitesse supérieure et se lache carrément...
Si certains prudes parlent de BD érotique, sachons appeler une chatte une chatte, et parlons de BD de cul ! Et encore, BD, il faut le dire vite. Nous sommes à la frontière entre le livre illustré et la BD. Car mis à part le second des trois récit qui nous offre des planches complètes, les deux autres tiennent plus de l'illustration.
Mais quelles illustrations ! Les amateurs du genre en sortiront tout émoustillés et les yeux en ronds de soucoupes ! Fidèle à son coup de patte si particulier, Loisel dans cet exercice concis nous régale de cadrages audacieux, d'une colorisation bien pensée qui mettent en valeur les formes de ses personnages et des situations.
Alors, oui, si les trois histoires ne sont que prétexte à ce dévergondage graphique, l'écriture reste agréable et le récit fluide. Mais bon, ne cherchons pas le raffinement d'un scénario tel que la Quête et profitons simplement du talent d'un Loisel qui se lache...
"Miss Pas Touche" de Hubert et Kerascoët
C'est sans réelle conviction que je me suis lancé dans la lecture de cette série. J'avais lu il y a quelques temps plusieurs planches dans le Canal BD que me passe mon libraire, et je n'avais pas vraiment accroché.
Mais c'était sans compter le talent de Hubert ! Un scénariste que j'ai découvert avec l'album "La Sirène des pompiers" et que j'avais adoré. Cette fois, Hubert avance un peu dans le temps pour laisser ces peintres de la fin du XIXe et nous planter son intrigue pendant la Belle Epoque.
On sent que pour lui, le contexte fait partie prenante de ses récits. Et il nous le rend très bien ! C'est à partir de cette trame qu'il compose son histoire avec des personnages loin de la caricature et de la simplicité ; alors qu'on pense avoir cerné un protagoniste, un événement ou rebondissement relance sa découverte et approfondit son caractère...
Malgré une connaissance plutôt mince de cette période, j'ai donc plongé tranquillement dans cette histoire apparemment simple et naïve. Rapidement, l'intrigue nous prend par la main, et le dessin du duo Kerascoët prend toute sa force. C'est simple, fin, efficace, un peu comme notre ingénue de Blanche qui débarque comme vierge dans une des maisons closes les plus réputée de Panam.
Et comme dans Jolies ténèbres (sans jamais en égaler l'intensité), le contraste entre le dessin "gentil" et ce qu'il raconte est parfois saisissant.
Au final, on dévore ces 4 tomes, tant on se laisse prendre par la vie tumultueuse de notre héroïne...
Je remarquerais juste comme certains déjà, que le premier cycle est bien meilleur que le second. Si de nouveaux personnages apparaissent, l'intrigue n'a pas la même intensité, et j'ai même trouvé la fin un peu brutale. Le premier cycle à la rigueur se suffit à lui seul.
"Nicolas Eymerich Inquisiteur" de Jorge Zentner et David Sala
Voilà déjà plus de 10 ans que j'ai découvert l'œuvre romanesque de Valério Evangelisti et son terrible et complexe personnage de Nicolas Eymerich, Inquisiteur. C'est donc avec une certaine circonspection que j'ai suivi sa parution et son adaptation BD.
Car si vous aimez les histoires simples et linéaires, ce n'est pas la peine de vous attarder sur le cas Evangelisti ! Quand j'ai lu ces romans, j'ai dû m'accrocher. Surtout au premier : on découvre l'univers de l'auteur, sa façon d'écrire et de composer et la complexité de son univers.
Du coup, je me suis dit : pouyouuuuuuuu, mon couillon! Une adaptation BD, je leur souhaite bien du courage pour en tirer quelque chose de potable et d'intelligible !
Et force est de constater que Jorge Zentner et David Sala ont du talent ! Chapeau messieurs ! D'une ça tient la route. De deux, c'est beau en prime (enfin bon, après, ça, c'est question de goût !).
Car 10 ans après, j'ai (re)découvert en BD avec délice cet univers torturé et radical qu'a imaginé Evangelisti. Et rien n'incarne mieux sa vision du monde que son personnage central : Nicolas Eymerich, Inquisiteur Général du Royaume d'Aragon au milieu du XIVe siècle. Froid, impitoyable, d'une intelligence retorse, le tout au service d'un dogme intransigeant. Cet inquisiteur général fait froid dans le dos et vous laisse un goût de cendre dans la bouche...
Et c'est là que le tour de force opère ! Les auteurs nous font vivre et suivre avec entrain les enquêtes de cet ignoble personnage, tout en y mêlant des univers radicalement différents.
Car chaque cycle est construit autour d'une enquête de Nicolas Eymerich et d'une autre intrigue se déroulant à une époque radicalement différente. Et malgré ces difficultés, on suit et on en redemande !
Graphiquement, j'ai trouvé que le travail de David Sala faisait aussi merveille. Son style graphique très personnel est tranché, tant sur le trait, la composition des planches, que dans la colorisation. On peut passer du dessin très précis d'un regard d'une rare force et profondeur, à un trait assez succin de personnage, et découvrir sur la planche suivante des paysages tout en couleur d'une grande intensité.
Car Sala excelle aussi dans les ambiances et joue avec sa palette chromatique de façon assez merveilleuse. Certaines planches me collent encore à la rétine. Tels les fers rouges si chers à notre inquisiteur, il marque en profondeur et de façon définitive son lectorat : la couleur sert l'intrigue et n'est pas seulement là pour le décorum. Les planches finales du second cycle sont tout simplement magistrales.
Alors, pour les amateurs de fantastique et/ou de SF un peu alambiqué, cette série est faite pour vous ! Et ne faites pas comme moi, pas la peine d'attendre 10 ans avant d'en savourer l'adaptation !
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