Je ne sais pas si, quand vous êtiez plus jeunes, vous avez dévoré comme moi les aventures du Petit Nicolas. Vous savez, il y avait le petit Nicolas et les Copains, avec dedans un gosse qui s'appelait Agnan, qui portait des lunettes et qui était le chouchou de la maîtresse. Trois raisons suffisantes pour Rufus, Nicolas, Alceste et les autres, de toujours lui refiler des coups de poings sur le nez (en lui laissant tout de même le temps de retirer ses lunettes)... Ces histoires me faisaient mourir de rire, et je pense qu'on n'a jamais attaqué Sempé pour immoralité? tout simplement parce qu'un enfant vit dans le monde sauvage auquel son animalité le destine jusqu'à ce que le rouleau compresseur de la morale passe par là. Je ne suis pas un fervent moraliste. J'écris beaucoup, et la caractéristique commune de toutes mes nouvelles et de tous mes romans, c'est que mes personnages n'ont jamais de morale, d'idée préconstruite de ce qui est bien et de ce qui est mal. Leurs actions sont déterminées par d'autres facteurs dans lesquels entre en jeu cette petite merveille qu'on appelle le libre-arbitre. Ils peuvent tuer par amour. Ils peuvent se lancer dans des causes humanitaires par simple désespoir ou délit d'orgueil. Cela veut dire que, quelque part ils sont restés des enfants. Au collège, j'avais encore (comme beaucoup de gosses de cet âge) une vision irréaliste du monde. Mes fantasmes, mes rêves et mes visions éronnées des choses occupaient bien la moitié de ma vie, tandis que la part rationnelle, instruite, moralisée, même croissante, était encore en retrait. C'est ce qui fait que toute jeunesse, selon moi, est pétrie de violence, mais aussi de magie. Je n'ai cependant jamais eu l'impression d'être un monstre, et dans mon souvenir (je parle ici de mes souvenirs réels, à distinguer chez un poète de ses souvenirs fictifs(oui, ça existe)), ce fut une période plus difficile pour moi que pour tous ceux qui avaient la chance de me connaître.
JE ne vais pas me plaindre du vif émoi que semble susciter mon texte, même s'il m'étonne. Je pensais que le monde actuel, surtout grâce aux gens de ma génération, avait réussi enfin à s'émanciper de ce genre de réaction morale et finalement assez stérile: j'entends par morale les idées fixes sur ce qu'il faut faire ou ne pas faire et avec lesquelles quelques gens en font marcher des milliers d'autres au pas, en rangs et vers la guerre. Néanmoins c'est une grande satisfaction pour moi car, comme certains esprits moins scandalisés que ceux de leclem ou glacius ont dû le deviner, la toute fin de cette histoire est une pure fantaisie imaginaire (je traduis ; ne s'est jamais produite). Voilà peut-être pourquoi je ne me sens coupable de rien ! J'ai simplement voulu faire un peu d'humour (noir) et une fois de plus, la fiction littéraire a montré sa terrible faculté à se faire passer pour la réalité ! ça prouve au moins que j'ai une plume efficace, alors merci pour vos commentaires ! Et promis, la prochaine fois j'ajouterai (pour les esprits fragiles): It's just a joke, my dear !
Bye.
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